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THEME DU TRIMESTRE - ( Décembre 2000 )

L'autoroute ferroviaire en France :

"Quand le Service Public ne rend plus service qu'à lui-même"

Autoroute roulante en Suisse - embarquement 008b.d5.jpg (14051 octets) Photo : HUPAC (reproduction interdite).

Qui s'oppose encore au ferroutage en France, hormis l'administration ? Peu de monde et sans doute peu de sociétés d'autoroutes. En effet, si la circulation des poids-lourds participent vivement au développement autoroutier en France, sur les sections saturées ils deviennent pour les exploitants un véritable problème. D'autant plus que les camions seraient à 100% responsables de l'usure de l'assise des chaussées autoroutières.

"Les chaussées s'usent parce que les produits s'en vont, elles vieillissent. La voie lente vieillit plus vite. Sur les assises de chaussée il n'y a que les poids lourds qui comptent, les véhicules légers ne comptent pas" J.C Albouy, Président de la SANEF - débat au Cercle des Transports - revue Transport n°378 (1996)

Le dossier ROOS :

ROOS est une société allemande de transport routier qui propose à l'état français d'exploiter et de financer elle même une ligne du nord au sud de la France en passant par le réseau ferré existant de la Vallée Saône/Rhône, de Toul à Rivesaltes. Le premier obstacle est d'obtenir l'autorisation de faire circuler le wagon porte-camions construit par Adtranz. Hors la SNCF a refusé cette autorisation dernièrement, le wagon étant jugé dangereux à cause de ses roues... trop petites ! Autant dire que la SNCF souhaite conserver son monopole (du néant pour l'instant), car ce wagon Adtranz est utilisé depuis longtemps sans le moindre problème par plusieurs pays, dont la Suisse. Et sachant que la SNCF est la seule administration à pouvoir autoriser la circulation d'opérateurs privés, et connaissant son point de vue sur la libéralisation européenne du rail, on peut juger plus facilement les explications de la SNCF concernant  le dossier ROOS...

Libérer le rail :

Certains vous diront que libérer le rail c'est aboutir aux dérives amenant les accidents qui endeuillent la Grande-Bretagne. Entre temps on oublie que les britanniques avaient, bien avant la privatisation, un réseau très délabré. La privatisation du réseau, il est vrai, n'a rien arrangé. Cependant, on se demande pourquoi dans l'avenir RFF (Réseau Ferré de France) ne resterait pas une entreprise publique ou semi-publique gérant le réseau existant avec la perception d'un péage auprès d'entreprises circulant librement. Cela annonce avec évidence la mort de la SNCF ou sa privatisation ! On peut aussi imaginer des régions ou des opérateurs de ferroutage exploiter des lignes sous le contrôle de RFF ? Les organismes divers de l'aéronautique arrivent bien à faire respecter globalement la réglementation imposée pour le pilotage et le matériel, pourquoi pas RFF ou l'UIC (Union Internationale des Chemins-de-fer) pour le chemin de fer ?

Organiser l'autoroute ferroviaire en France :

Même avec de la bonne volonté, le projet Roos ne pourrait être une solution durable compte tenu de l'évolution du trafic en Vallée du Rhône. De plus, son intermodalité est limitée aux accès de Toul et Rivesaltes. Dès aujourd'hui on peut souhaiter un projet plus ambitieux, mais non destiné à remplacer l'autoroute - Les camions doivent pouvoir choisir librement entre rail et autoroute. (Grandruban lance le défi !) : une véritable ligne dédiée au ferroutage du nord au sud de la France, à la fois rapide et pratique pour séduire les transporteurs. Des gares reliées aux autoroutes à Avignon, Lyon, Dijon ou Langres, Paris, Lille (et plus tard Barcelone et Rotterdam...). Dès maintenant Eurotunnel voudrait bien franchir les frontières du Pas-de-Calais avec son Shuttle. Alpetunnel attend le feu vert de la SNCF, normalement prévu pour 2001, concernant l'axe Lyon-Turin. Par ailleurs, la SNCF défend pour ce trajet le wagon du constructeur alsacien Lohr qui ne permet pas de transporter le tracteur et la remorque ensemble - Peut-on alors encore parler d'autoroute ferroviaire !? En attendant, le trafic attendu demain permet toujours de souhaiter le doublement des tunnels routiers alpins et leur accès en "tout autoroute" dans la partie française. Dans cette optique, le rail ne remplace pas la route, il l'épaule. Une bonne idée à l'appui, cependant inadaptée par son kilométrage : le projet haut-savoyard de passage sous le Mt-Blanc dont le ferroutage est concédé, du Fayet à Morgex, à une société d'autoroutes : ATMB (Autoroutes et Tunnel du Mt-Blanc).

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Autoroute roulante en Suisse, pendant l'embarquement et en marche- Photos : HUPAC (reproduction interdite).

Régler le problème social dans le transport routier :

C'est bien beau le ferroutage pour nous qui empruntons essentiellement les autoroutes pour les vacances, mais ça nourrit pas notre transporteur routier ! Un camion sur un train, c'est un chauffeur en temps de repos, donc pas payé. Non seulement on lui retire son plaisir de conduire, mais pour en plus pas un franc (un euro, pour faire futuriste!). Un élément oublié par J.C Gayssot qui devra fuir en 1999 un relais routier, non loin du Tunnel du Fréjus, où en visiteur il avait exprimé auprès des chauffeurs sa volonté de mettre les camions sur les trains. Le voyage forme la jeunesse monsieur Gayssot ! Un voyage qu'il n'a peut-être pas pris la peine de poursuivre dans les dossiers de son ministère, puisqu'il faut savoir que l'Etat est en France la première entreprise de transport routier, sous le couvert de la SNCF et de GEODIS (Sernam, Sceta, Calberson, Bourgey-Montreuil, TAT express, Jean Savin...). Et le multimodal est loin d'être un modèle pour la majorité de ces transporteurs, en plus de faire de la concurrence déloyale aux transporteurs privés par des tarifs très attractifs. Oh, on peut trouver pire : Un transporteur allemand, nommé Betz, qui exploite des chauffeurs des pays de l'est aux salaires de misère pour tracter des remorques et des cargaisons de tous les pays de l'Union Européenne.

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Il est souhaitable que les administrations en charge du transport prennent rapidement toutes les décisions qui s'imposent mais, comme pour de nombreux dossiers, elles ne semblent pas avoir la volonté de le faire, souvent plus pour des raisons de politiques internes et externes au transport que pour des raisons de financement. C'est fort regrettable, car une majorité de citoyens en subit les conséquences. A bon entendeur...

 

Cyril Chauplannaz